Nicolas Nabokov (1903-1978)
Télécharger le PDF de la notice
Né à Lubza (aujourd’hui en Bélarus), Nicolas Dmitrievich Nabokov (1903-1978), cousin germain du romancier et essayiste Vladimir Nabokov, a étudié la composition à Yalta avec Vladimir Rebikov (1866-1920) puis, après le départ pour l’exil de l’ensemble de la famille Nabokov, à la Hochschule für Musik de Stuttgart avec Joseph Haas (1879-1960), puis avec Paul Juon (1872-1940) au Conservatoire de Berlin, où il a également fréquenté Ferruccio Busoni. C’est dans la capitale allemande qu’il fait ses débuts comme critique musical, en contribuant à Rul’, le quotidien libéral en langue russe fondé par son oncle Vladimir (père de l’écrivain). Ces contributions de jeunesse n’ont pas été recensées.
À Paris, où il vit de 1924 à 1933 et fait entendre ses premières œuvres (dont le ballet Ode, aux Ballets russes, en 1928, et une Première Symphonie en 1929-1930), Nabokov contribue à la presse russe émigrée, avec des articles dans Blagonamerennyi, périodique fondé par son futur beau-frère Ioann Shakhovskoi, Volia Rossii (sur Diaghilev) et Chisla (dont un article sur Serge Prokofiev en 1930) ; mais aussi en allemand, avec une chronique de la vie musicale française parue dans Melos en 1927 ; et en français, à La Musique, où son article « La vie et l’œuvre de Serge de Diaghilew » (1929) provoque une brouille temporaire avec Igor Stravinsky, ce dernier mécontent d’y lire que Diaghilev avait joué un rôle important dans la genèse de Petrouchka et de Noces.
Exilé une seconde fois à partir de 1933 aux États-Unis, où il est naturalisé en 1939, Nabokov, encouragé par les amitiés qu’il noue à Washington avec de jeunes diplomates et soviétologues, reprend la plume en 1941, publiant entre cette date et 1951 environ vingt-cinq articles, parus pour la plupart dans des magazines d’opinion de tendance libérale : The New Republic (en 1941, sur la musique en URSS), Atlantic Monthly (de 1942 à 1951, notamment sur Prokofiev, Vaslav Njinsky, Diaghilev, Serge Koussevitzky), Harper’s Magazine (en 1943, sur Dimitri Chostakovitch), Partisan Review (en 1944, sur Stravinsky – article qui entraîne un réchauffement dans leurs relations), Politics (en 1948, sur les purges dans le monde musical en Union soviétique). Certains de ces articles, ainsi que le chapitre « Christmas with Stravinsky » paru en 1949 dans Igor Stravinsky : A Merle Armitage Book, édité par Edwin Corle, sont repris en 1951 dans le livre de souvenirs Old Friends and New Music, publié dans deux éditions légèrement différentes à Boston et à Londres. (On trouvera un recensement de tous ces articles dans la bibliographie en fin de volume de Vincent Giroud, Nicolas Nabokov : A Life in Freedom and Music, New York et Oxford, Oxford University Press, 2015.)
Réinstallé à Paris en 1951 après sa nomination comme secrétaire général du Congrès pour la liberté de la culture (CLC), Nabokov continue de publier régulièrement dans la presse d’intérêt général : Preuves, l’un des organes du CLC (un compte rendu de The Rake’s Progress en 1952, des souvenirs sur le comte Harry Kessler en 1962, également parus en allemand dans Der Monat la même année), Encounter, autre organe du CLC (en 1953, sur la musique soviétique après la mort de Staline), The Listener, Counterpoint et Le Figaro littéraire ; il contribue en outre à deux reprises à La Revue musicale ainsi qu’à High Fidelity (en 1957, pour le soixante-quinzième anniversaire de Stravinsky) et à la Revue internationale de musique, qui à l’automne 1951 publie « La musique en Union soviétique », traduction d’un article paru dans Musical America et repris dans Preuves, et dans lequel Nabokov évoquait les attaques subies dans leur pays depuis 1948 par les compositeurs russes, notamment Prokofiev et Chostakovitch. Le rédacteur en chef de la revue, Jacques Chailley, ayant saisi l’Association des musiciens progressistes, la contribution de Nabokov est présentée comme le premier volet d’une « Tribune libre », accompagné d’une mise au point éhontément stalinienne signée par Jean Prodromidès. Dix ans plus tard, à l’automne 1961, Nabokov publie dans le même périodique un nouvel article sur l’état de la musique en Union soviétique, sans provoquer cette fois de réaction particulière.
Nommé en 1962 conseiller culturel du maire de Berlin, Willy Brandt, avant tout pour redynamiser la vie culturelle de la ville après la construction du mur, Nabokov y publie en 1964, en langue allemande, une monographie sur Stravinsky, simplement intitulée Igor Strawinsky, dont le compositeur se déclare fort satisfait. Se fixant de nouveau principalement aux États-Unis après sa démission du CLC par suite de la révélation du financement (partiel) de l’organisation par des fondations servant de paravents au gouvernement fédéral américain par le biais de la CIA (arrangement qui ne lui avait pas été révélé), Nabokov édite avec Anna Kallin, la série Twentieth-Century Composers, dont quatre volumes paraissent chez Weidenfeld et Nicolson (et aux États-Unis chez Holt, Rinehart and Winston) entre 1971 et 1974, dus respectivement à Virgil Thomson (American Music Since 1910), Hans Heinz Stuckenschmidt (Germany and Central Europe), Humphrey Searle et Robert Layton (Britain, Scandinavia and the Netherlands), et Fred Goldbeck (France, Italy and Spain) ; le cinquième volume, annoncé, et que Nabokov lui-même devait écrire en collaboration avec Nicolas Slonimsky, est resté inachevé. Mais Nabokov se consacre surtout à la rédaction de son autobiographie, Bagázh, qui paraît simultanément en 1975 aux États-Unis et en Allemagne, puis en France, sous le titre Cosmopolite, l’année suivante. Parmi ses dernières publications, on signalera une étude de Noces de Stravinsky parue posthumement en 1978 dans Slavica Hierosolomitana et des souvenirs sur W.H. Auden, inclus dans le volume W.H. Auden : A Tribute, édité par Stephen Spender (Londres, Macmillan, 1975) et sur Boris Blacher, rédigés en 1975 pour un concert-hommage de l’Orchestre de Cleveland et repris plus récemment dans le volume Boris Blacher, édité par Heribert Heinrich et Thomas Eickhoff (Hofheim, Wolke Verlag, 2003). Au moment de sa mort soudaine, des suites d’une opération bénigne, Nabokov travaillait à un nouveau livre de souvenirs ainsi qu’à un projet d’histoire orale, reposant sur une série d’interviews avec des personnalités qu’il avait rencontrées tout au long de sa vie.
Les écrits de Nabokov se montent donc à trois monographies et une soixantaine d’articles recensés, certains parus en plusieurs langues, à quoi il faut ajouter des inédits conservés principalement dans deux fonds d’archives : Nicolas Nabokov Papers, Harry Ransom Center (The University of Texas at Austin) et Nicolas Nabokov Papers, Beinecke Rare Book and Manuscript Library (Yale University).
Vincent GIROUD
15/10/2018
prénom | Nicolas |
---|---|
nom | Nabokov |
année de naissance | 1903 |
année de décès | 1978 |
identique à | http://data.bnf.fr/14793433/nicolas_nabokov/ |