César Franck
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En 1906 paraît le premier ouvrage musicographique de Vincent d’Indy, consacré à son maître vénéré disparu seize ans plus tôt. Deuxième volume de la collection « Les Maîtres de la musique » à la librairie Félix Alcan, ce César Franck paraît la même année que le Palestrina de Michel Brenet et le Jean-Sébastien Bach d’André Pirro. Franck n'ayant fait encore l’objet que de modestes publications, que d’Indy cite d’ailleurs volontiers, son livre fait date et reste le plus important et influent avant celui de Léon Vallas – également biographe de d’Indy –, un demi-siècle plus tard (La Véritable Histoire de César Franck, 1955).
Le César Franck de d’Indy est divisé en trois parties : « l’homme », « l’artiste et l’œuvre musical », « l’éducateur et l’œuvre humain », complétées par un catalogue de l’œuvre et une bibliographie. La deuxième partie est de loin la plus importante, avec son ample étude des trois « époques » du compositeur. L’intention avouée de l’auteur est « de montrer et de faire aimer l’homme comme [il] l’[a] connu et aimé [lui]-même […] » (D’Indy, César Franck, p. 236). La subjectivité est donc affichée, d’Indy ne disposant d’ailleurs pas du recul temporel ni affectif nécessaire par rapport à l’objet de son étude. Idéalisant son maître, il le décrit comme un homme d’une grande bonté, presque un saint, semant de nombreux parallèles avec la figure du Christ dont l’emphase rhétorique porte à sourire. L’ouvrage est souvent comparé pour cette raison à une « hagiographie ». Toutefois, s’il pare Franck de nombreuses vertus (charité, modestie, travail…), d’Indy révèle aussi son tempérament « passionné » (ibid., p. 42) et certains aspects un peu ridicules et d’ailleurs touchants du personnage. Il ne s’interdit pas non plus – bien au contraire – de critiquer certaines de ses œuvres qu’il juge moins bien venues, comme ses compositions de jeunesse, certaines pages des Béatitudes ou ses opéras Hulda et Ghisèle.
L’ouvrage est bien entendu marqué par les idées et partis-pris de d’Indy. Les zones d’ombre entourant l’existence du compositeur lui permettent d’idéaliser la trajectoire de l’artiste dans l’histoire musicale du XIXe siècle. Dès la première page, apparaissent les deux idées maîtresses : Franck serait le « véritable successeur du maître de Bonn » (ibid., p. 1) et, quoique né à Liège, en Wallonie, il est bien un compositeur français. Par son intermédiaire, d’Indy cherche à relier la jeune école française à laquelle il appartient à la figure tutélaire de Beethoven. Directeur de la Schola Cantorum, il désigne pour finir celle-ci comme l’établissement dépositaire de l’enseignement de Franck. Dans un registre plus polémique, il exprime sa rancune à l’égard du Conservatoire, des ministères et de l’Institut, qui traitèrent Franck sans beaucoup d’égards. De même, il sème comme dans tous ses écrits des allusions à l’actualité : critiques du matérialisme, du vérisme, piques lancées à Grieg et Zola (en réaction à leur esthétique ou à leur position dans l’Affaire Dreyfus) et aux Allemands.
Le point de vue de d’Indy sur Franck a été depuis souvent nuancé, discuté, contesté, à juste titre. L’ouvrage est néanmoins resté une référence pour les biographes suivants, les nombreux souvenirs personnels et anecdotes qu’il contient – souvent relatés à la première personne du singulier – demeurant irremplaçables. Joël-Marie Fauquet, le plus récent biographe de Franck, sait d’ailleurs lui rendre justice, non sans en faire la critique sur nombre de points. Loin d’une froide présentation scientifique, l’ouvrage contient aussi de nombreuses considérations esthétiques, voire philosophiques, et des comparaisons picturales, lesquelles, quoique éminemment subjectives, lui donnent tout son intérêt et son originalité et permettent de replacer Franck dans le contexte artistique de l’époque.
Émanant d’un des franckistes les plus autorisés, le César Franck de d’Indy connut un succès certain et fut plusieurs fois réédité. Il a fait l’objet de traductions et de publications dans plusieurs langues en Europe, en Asie, et dans les deux Amérique.
Gilles SAINT ARROMAN
(22/01/2017)
éditions numérisées | |
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genre | Biographie |
éditeur | Félix Alcan |
lieu d'édition | Paris |
années d'édition | 1906 |
nombre de pages | 253 |
langue originale | français |
traductions | |
compositeur |