Souvenirs d'un musicien, précédés de notes biographiques écrites par lui-même
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Cette publication posthume est un florilège de douze articles du compositeur Adolphe Adam, réunis par sa veuve Chérie Couraud après la disparition du musicien (1856). L’anthologie représente une modeste sélection au sein de quelque 380 articles signés et publiés dans L’Impartial, la Revue et Gazette musicale de Paris, Le Monde dramatique, Le Constitutionnel et L’Assemblée Nationale. Sans appareil critique, cette édition de 1857 ne précise ni la localisation ni la date des feuilletons. Deux ans plus tard, les Derniers souvenirs d’un musicien seront édités dans des conditions analogues.
Les articles sélectionnés sont majoritairement biographiques, à la manière romancée des monographies publiées dans la Revue et Gazette musicale depuis 1835. Ouvrant le volume, ses « Notes biographiques » (p. VII-LIV) reprennent quasi intégralement celles du manuscrit autobiographique, conservé à la Bibliothèque-musée de l’Opéra de Paris (Ca 1850, cote Rés. 2141). Elles révèlent l’aspect zigzaguant de sa formation et de ses débuts parisiens, avant ses voyages européens entrepris par souci d’ouverture. Par-là, elles justifient partiellement le titre (abusif) de Souvenirs et sont complétées par le catalogue chronologique de ses œuvres.
La suite des articles couvre presque cent cinquante ans de musique lyrique française au fil d’études sur « L’Armide de Lully », N. Dalayrac, J.-P. Rameau (« Un musicien du 18e siècle », p. 135-164), J.-J. Rousseau, F.-A. Boieldieu et L.-J.-F. Hérold. De l’ensemble se dégage une vision érudite sur le siècle des Lumières. Le compositeur du temps de Scribe y défend le théâtre ramiste et ses danses inventives, la simplicité naïve du Devin du village de Rousseau (p. 198) ou encore les « mélodies franches, aisées, naturelles » des opéras-comiques de Dalayrac (p. 266). En son temps, cette vision singularise le chroniqueur, fils de Louis Adam, claveciniste puis piano-fortiste ayant côtoyé C. W. Gluck à l’Académie royale de Musique. Toutefois, l’abondance d’anecdotes rehausse ces tableaux de mœurs d’Ancien régime avec le talent d’un conteur du temps de Dumas. Concernant ses contemporains, l’étude sur F.-A. Boieldieu, son professeur de composition au Conservatoire de Paris, est l’occasion de glisser quelques préceptes de l’école française sous la Restauration : à la présentation de son devoir hyper modulant, le jeune Adolphe se serait attiré la réplique du maître : « - Mais les choses essentielles, la tonalité et un motif ? »
Enfin, trois articles portent un regard pertinent et humoristique sur les pratiques musicales contemporaines. Relevons le fléau que représentent les sessions d’amateurs invétérés sous la Monarchie de Juillet, « des étudiants, des employés, des commerçants, qui préfèrent cette réunion aux cafés et aux estaminets » (« Le concert des amateurs », p. 47). Quant aux « Musiciens de Paris » (p. 51-63), ils déploient une classification quasi sociologique de la profession dans la cité, du salon au bal, de l’église à l’Opéra, rehaussée d’observations comparatistes en Europe.
Au vu des rééditions successives du volume – 1860, 1868 chez Lévy, 1884 chez Calmann-Lévy – on mesure l’engouement durable du compositeur du Postillon de Lonjumeau. Mais on peut également deviner l’impact du fonds « ancien » auprès d’un lectorat de mélomanes. Ceux-ci étancheraient leur curiosité envers les compositeurs des Lumières ayant déserté la scène lyrique, tout autant qu’envers ceux qui intègrent le répertoire des scènes françaises. Durant ce demi-siècle, les reprises parisiennes de La Dame blanche de Boieldieu, ou encore du Pré-aux-Clercs d’Hérold, dépassent en effet la millième.
Sabine TEULON LARDIC
10/10/2018
Table des matières
. Dédicace de Chérie Adam [au Docteur Louis Véron]
. Notes biographiques
. Boïeldieu [L’Impartial, 11 octobre 1834, ii/283, p. 1-2.]
. Hérold [Le Constitutionnel, 11 septembre 1848, n° 255, p. 1-2.]
. Les concerts d’amateurs. Tribulations d’un musicien [L’Impartial, 3 février 1834, ii/33, p. 1-2.]
. Les musiciens de Paris [L’Impartial, 11 novembre 1833, I/72, p. 1-2.]
. De l’origine de l’opéra en France [L’Impartial, 25 juin 1834, ii/171, p. 1-2.]
. L’Armide de Lully [L’Impartial, 27 juin 1834, ii/173, p. 1-3 ; 28 juin 1834, ii/174, p. 1-3.]
. Un début en province [Revue et Gazette musicale de Paris, 27 décembre 1835, ii/52, p. 421-426.]
. Le violon de fer-blanc [Le Monde dramatique, 1838, tome 6, p. 369-373.]
. Un musicien du XVIIIe siècle [« Un musicien il y a cent ans », L’Impartial, 8 mai 1834, ii/128, p. 1-3 ; 9 mai 1834, ii/129, p. 1-3.]
. Une conspiration sous Louis XVIII [Le Monde dramatique, 1837, tome 4, p. 67-72.]
. Jean-Jacques Rousseau musicien [Le Constitutionnel, 13 septembre 1851, n° 256, p. 1-3 ; 14 septembre 1851, n° 257, p. 1-3.]
Nota bene : l’identification de la première publication de chaque article, mentionnée entre [], est due aux récents travaux de Matthieu Cailliez (voir la bibliographie).
Pour aller plus loin
- Matthieu Cailliez, « Adolphe Adam, porte-parole de ‟l’école française” de l’opéra-comique. Inventaire et étude synthétique de ses critiques musicales (1834-1856) », dans EVERIST, Mark (éd.), Music Criticism Network Studies, n° 1 : Perspectives on the French Musical Press in the Long Nineteenth Century, Lucques, Centro Studi Opera Omnia Luigi Boccherini, 2018.
- Katharine Ellis, « The Uses of Fiction : contes and nouvelles in the Revue et Gazette musicale de Paris, 1834-1844 », Revue de musicologie, 90/2, 2004, p. 253-281.
- Sabine Teulon Lardic, « Du lieu à la programmation : une remémoration concertée de l’ancien opéra-comique sur les scènes parisiennes (1840-1887) », dans TERRIER, Agnès, DRATWICKI, Alexandre (dir.), L’Invention des genres lyriques français et leur redécouverte au 19e siècle, Lyon, Symétrie / Palazetto Bru Zane, 2010, p. 347-385.
éditions numérisées | |
---|---|
genre | Autobiographie (Mémoires) |
éditeur | M. Lévy frères |
lieu d'édition | Paris |
années d'édition | 1857 |
nombre de pages | 266 |
langue originale | français |
compositeur |