Pensamientos, aforismos, paradojas y otras zarandajas, con sus puntos y ribetes de autobiografía
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Sous ce titre pittoresque – Pensées, aphorismes, paradoxes et autres vétilles, agrémentés de quelques touches autobiographiques (1898-1909) – se trouve réuni un ensemble bigarré de réflexions intimes, méditées puis rédigées au fil des ans, reflétant le pan le plus philosophique de l’idéal moral et artistique d’Albéniz. Laissant parler son cœur, celui-ci révèle au monde dans ces confessions un être hautement spirituel, cultivant une vie intérieure profonde et intense. Il ne se présente jamais plus proche et sincère que dans ces paragraphes, qui s’avèrent une sorte de refuge où il peut épancher ouvertement ses impressions et ses préoccupations les plus secrètes.
Nous ne connaissons pas avec certitude les raisons qui ont favorisé la rédaction de ce nouveau cahier à partir du mois d’avril 1898, ni ce à quoi renvoie l’étrange dédicace qui y figure : « À la Violette à L’Ail de son Bèbi », mais l’idée semble être née de l’addition de facteurs convergents. D’abord, de ses problèmes stomacaux habituels, qui s’étaient considérablement aggravés au cours des mois précédents, au point de faire craindre pour sa vie. Les épisodes de convalescence, de moins en moins espacés et de plus en plus longs, l’obligeaient à passer de longues périodes loin de la chaleur familiale, et il endurait un véritable calvaire. Ensuite, il était accablé par la succession interminable des disparitions d’êtres très proches : ainsi celle du frère de sa femme Rosina, très récente, qui alourdissait son deuil de deux de ses sœurs, de deux de ses filles et du mari de sa seule sœur encore vivante, Clementina. À cela s’ajoutait l’embarrassante situation personnelle de ses parents depuis que son père Ángel avait entamé une double vie en compagnie de la cuisinière de la famille, dont il devait avoir en tout cinq enfants. Enfin, il souffrait d’un manque évident de soutien de la part de ses collègues et amis face à ses projets d’avenir, tout particulièrement à sa trilogie sur des thèmes arthuriens, King Arthur.
Convalescent et sans la bénédiction de ses amis les plus intimes : telle était la situation d’Albéniz au moment précis où il entame le cahier qui nous occupe. Privé de confidents, écrire ce qui occupait son esprit s’imposait à lui comme un exutoire. N’a-t-il pas pensé que c’était une bonne occasion de commencer à laisser ses idées à la postérité, peut-être convaincu qu’en raison de sa santé fragile, il pouvait quitter le monde à tout instant ?
Précisément, en ce début de 1898, le séjour à Nice, la ville où il amorce ce journal, allait correspondre à un tournant dans le développement des rapports personnels entre Albéniz et son mécène, le banquier et philanthrope Francis Money-Coutts. A priori, l’antagonisme irréductible de deux tempéraments aussi dissemblables était prévisible, et pourtant, la fréquentation continuelle et les fréquents accrochages allaient curieusement forger, dans un processus lent et parallèle, une relation de plus en plus solide et profonde. En vérité, le respect, la sincérité et la sensibilité de son mécène ont déteint sur l’état d’âme de l’artiste, et le soutien que celui-ci a reçu de celui-là en a fait petit à petit un ami et un confident. L’Albéniz le plus philosophe prend son essor grâce à ce point d’appui, au moment précis où commence son cheminement vers cette musicalité profonde, transcendante et personnelle de la dernière étape de sa vie.
La rédaction de ce bref mais exquis journal personnel, qui ne compte que 23 pages et 27 entrées au cours d’une période de onze ans (1898-1909), n’a jamais été bien assidue. Il s’agit plutôt d’un recueil de réflexions variées, qu’il notait de manière intermittente, habituellement à la faveur d’intervalles de vacances ou de repos, spécialement à Nice et à Tiana, et qui constitue le bouquet le plus intime de sa production littéraire. Le document autographe est conservé au Museu de la Música de Barcelone (R2167), et la seule édition existante, due à Enrique Franco, présente malheureusement d’importants passages censurés, ayant trait à la religion et au sexe, sans parler de multiples erreurs dans les dates.
Les aspects auxquels Albéniz s’attache le plus, et qui dénotent une vision personnelle vraiment singulière, sont ceux qui concernent l’amour et les relations affectives et conjugales, les femmes et la misogynie, la foi dans l’être divin et la religion, l’attitude face à la mort, la crise politique et le contexte musical espagnol déprimant, ainsi que la défense du libéralisme, l’érudition, la bonté, l’amitié, l’art en général et l’être humain en particulier.
L’ensemble de ces pages nous dévoile un Albéniz inédit : ni le musicien ni l’homme, mais le philosophe que l’homme portait en lui. Un authentique joyau qui, par malheur, est incomplet : la dernière page du document, qui contient les deux dernières pensées du compositeur, s’avère pratiquement illisible à cause d’une main irrespectueuse qui a voulu en saboter le contenu et a résolu de gratter l’encre de la page en question. La chose est particulièrement regrettable si l’on songe que l’une et l’autre datent apparemment de l’année 1909, ce qui nous prive à jamais de la connaissance des ultimes, et probablement précieux commentaires dont un Albéniz en détresse dans son combat pour la vie tâchait de nous faire part.
Passages célèbres :
- Aujourd’hui il n’y a pas de génies (du moins nous ne les connaissons pas ou, ce qui revient au même, nous ne les reconnaissons pas), et en ce qui me concerne... je sais quel soulier va à mon pied comme un gant !!! (09/02/1899)
- L’homme a inventé Dieu uniquement, exclusivement à cause de la peur que la mort lui inspire. (21/02.1901)
- Blanc ou noir !!! Le plus terrible dans la vie, c’est le gris !!! Mon malheur est bien grand : être idiot et animé de hautes aspirations !!! (11/03/1901)
- Le peuple espagnol chante autant qu’il pense peu !!! (03/06/1902)
- On dit : « Les desseins de Dieu sont insondables !! » Disons plutôt que la stupidité et la vanité humaine, dans leur inconscience même, sont éternelles !!! (26/08/1903)
- L’absurdité la plus grossière, pourvu qu’elle parvienne à l’inculte sous l’égide de l’imprimerie, aura toujours plus de valeur à ses yeux que la vérité énoncée oralement. (26/08/1903)
- Triste érudit que celui qui s’avère incapable de lire en lui-même !! (04/09/1903)
- Celui qui croit sans créer est en butte au malheur. (16/09/1903)
- L’amour n’a jamais été une passion altruiste, alors que l’amitié peut et doit l’être !!! (28/02/1904)
- La femme est fourbe par nature, et ce dès qu’elle quitte le giron maternel. Malheur à l’homme qui tombe sur une femme qui prétend agir en toute sincérité !!! […] Il y a des exceptions, dites-vous ? Naturellement… ma femme bien sûr, mais elle est bien la seule !!! (28/02/1904)
- En Art, la formule idéale devrait être « la variété dans la logique ». (20/04/1904)
Lluís RODRÍGUEZ SALVÀ
19/08/2019
(Traduction : Philippe Dessommes Flórez)
Pour aller plus loin :
- FRANCO, Enrique : Impresiones y diarios de viaje, Madrid, Fundación Isaac Albéniz, 1990. [édition fautive, comportant des passages censurés]
- RODRÍGUEZ SALVÀ, Lluís : Isaac Albéniz (1860-1909): el músico y el hombre a través de sus escritos, Oviedo, Universidad de Oviedo, 2020. [Thèse de doctorat portant sur la totalité de ses écrits]
Notice en espagnol :
Bajo este pintoresco título se encuentra reunido un conjunto variopinto de reflexiones íntimas, meditadas y redactadas a lo largo de los años, y reflejo de la vertiente más filosófica del ideal moral y artístico albeniciano. A pecho descubierto, sus confesiones revelan al mundo un ser altamente espiritual y cultivador de una vida interior profunda e intensa. Nunca fue tan cercano y sincero como se nos presenta en estos párrafos, convertidos en una especie de refugio desde donde poder verter abiertamente sus impresiones e inquietudes más secretas.
Desconocemos a ciencia cierta las causas que impulsaron el nacimiento de este cuaderno en abril de 1898, ni a quien se refiere la peculiar dedicatoria del mismo: «À la Violette à L’Ail de son Bèbi», pero parece haber brotado de la convergencia de un cúmulo de factores: sus habituales problemas estomacales, que habían experimentado un agravamiento considerable en los meses anteriores, lo que llegó a hacer temer por su vida; sus períodos de convalecencia, cada vez más continuos y prolongados, que le obligaron a pasar largas temporadas de auténtico calvario fuera del calor familiar; el peso de sucesivos e inacabables fallecimientos de sus seres cercanos, como la reciente del hermano de su mujer Rosina, que se sumaba a la de dos de sus hermanas, dos de sus hijas y el marido de su única hermana viva, Clementina; la embarazosa situación personal de sus padres, desde que su padre Ángel iniciara una doble vida junto a la cocinera de la familia, con la que llegó a tener cinco hijos; y la evidente falta de respaldo de colegas y amigos ante sus futuros proyectos, en especial su trilogía sobre temas artúricos King Arthur.
Convaleciente y sin la bendición de sus más íntimos amigos: así se encontraba Albéniz en el justo instante en que inicia el cuaderno que aquí nos ocupa. Sin confidentes, escribir lo que le pasaba por la cabeza era la válvula de escape que necesitaba. Quizás incluso pensase que era una buena ocasión para comenzar a dejar para la posteridad sus ideas personales, convencido, quizás, de que, por su fragilidad física, podía dejar este mundo en cualquier momento.
Precisamente, la estada en Niza a inicios de 1898, desde donde se inicia el diario, iba a significar un punto de inflexión en la maduración de la relación personal entre Albéniz y su mecenas, el banquero y filántropo Francis Money-Coutts. A priori, el choque de trenes entre dos personalidades tan dispares era totalmente previsible, pero, sin embargo, el roce y el contacto continuo irían sorprendentemente forjando, paralela y lentamente, un vínculo entre ellos que cada vez resultaría más sólido y hondo. La verdad es que el respeto, la sinceridad y la sensibilidad de su mecenas fueron haciendo mella en el ánimo del artista, y el apoyo que en él encontró lo fue convirtiendo en amigo y confidente. El Albéniz más filosófico tiene su inicio precisamente en este punto, justo el momento en que comienza su camino hacia la musicalidad profunda, trascendente y personal de su última fase vital.
La escritura de este breve pero delicioso cuaderno personal, de sólo 23 páginas y 27 entradas a lo largo de once años (1898-1909), nunca fue demasiado constante, más bien un compendio errático de meditaciones varias que recogía habitualmente en épocas vacacionales o de descanso, especialmente en Niza y Tiana, que constituye el regalo más íntimo de toda su faceta literaria. El autógrafo se conserva en el Museu de la Música de Barcelona (R2167) y la única edición existente, obra de Enrique Franco, lamentablemente contiene notables pasajes censurados, los de carácter religioso y sexual, además de múltiples errores en las fechas.
Los aspectos en los que Albéniz se centra en mayor medida y que denotan una visión personal más peculiar son los relativos al amor y las relaciones afectivo-conyugales, las mujeres y la misoginia, la fe en la divinidad y la religión, la postura ante la muerte, la crisis política y el deprimente ambiente musical de España, así como la defensa del liberalismo, la erudición, la bondad, la amistad, el arte en general y el ser humano en particular.
En su conjunto, nos descubren un Albéniz inédito: ni el músico ni el hombre, sino el filósofo que llevaba dentro. Una auténtica joya que, por desgracia, se halla incompleta: la última página del cuaderno autógrafo, que contiene los dos últimos pensamientos del compositor, resulta prácticamente ilegible por culpa de una mano indecorosa que quiso sabotear su contenido, decidiendo raspar la tinta de la página en cuestión, un hecho especialmente penoso teniendo en cuenta que ambas parecen estar fechadas en 1909, lo que nos priva para siempre de conocer unos postreros y, sin duda, valiosos comentarios que procuró dejarnos un Albéniz entonces ya casi derrotado en su batalla por la vida.
Pasajes célebres:
- Hoy día no hay genios (por lo menos no los conocemos o, lo que es lo mismo, no los reconocemos), y en cuanto a mí… ¡¡¡demasiado sé dónde me aprieta el zapato!!! (09/02/1899)
- El hombre ha inventado a Dios única y exclusivamente por miedo a la muerte. (21/02/1901)
- ¡¡¡Blanco o negro!!! ¡¡¡Lo terrible en la vida es el gris!!! ¡¡¡Gran desgracia es la mía: ser tonto con aspiraciones!!! (11/03/1901)
- ¡¡¡El pueblo español canta tanto como piensa poco!!! (03/06/1902)
- Dicen: ¡¡los altos juicios de Dios son inescrutables!! ¡¡¡Decid, más pronto, que la estupidez y la vanidad humana, dentro de su misma ignorancia, son y serán eternas!!! (26/08/1903)
- La más burda atrocidad, con tal de que llegue al inculto bajo la égida de la imprenta, tendrá siempre más valor que la verdad emitida oralmente. (26/08/1903)
- ¡¡Mediano erudito aquél que no haya sabido leerse a sí propio!! (04/09/1903)
- ¡¡Desgraciado aquél que cree y no crea!! (16/09/1903)
- ¡¡¡¡Nunca fue el amor una pasión altruista, como puede, y debe serlo, la amistad!!!! (28/02/1904)
- La mujer es embustera per se y desde que deja el materno claustro. ¡¡¡Desgraciado el hombre que topa con una que pretenda ejercer de sincera!!! […] ¿¿¿Que hay excepciones??? Naturalmente… ¡¡¡mi mujer, y pare usted de contar!!! (28/02/1904)
- La fórmula ideal en Arte debiera ser «variedad dentro de la lógica». (20/04/1904)
genre | Autobiographie |
---|---|
langue | espagnol; castillan |
date | 1898 |
description matérielle et bibliographique | Cahier autographe de 23 pages et 27 entrées rédigées au cours d’une période de onze ans (1898-1909), conservé au Museu de la Música de Barcelone (R2167). |
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