De la musique mécanique et de la musique philosophique, suivi d'une épître à un célèbre compositeur Français
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Cette brochure reprend en 1826 trois articles parus dans L’Abeille en 1821 : au cœur de la querelle suscitée par les représentations de l’Otello de Rossini au Théâtre-Italien, Berton répondait là à Stendhal, qui voyait en lui le champion de la contre-révolution musicale. Augmentée d’une épître en vers à un musicien français, Boieldieu en l’occurrence, que Berton enjoint à ne pas baisser les armes face à la nouvelle école, cette brochure constitue un jalon essentiel de l’anti-rossinisme français sous la Restauration, même si le nom de Rossini n’y apparaît jamais. Le texte est structuré par une forme agonistique qui défend vigoureusement les anciens maîtres de la musique (Berton est membre de l’Institut et professeur au Conservatoire) contre les errements de la jeune école.
De fait, la plus grande partie du texte vise à canoniser un panthéon de compositeurs, au sein desquels figurent Haydn, mais aussi Pergolèse, Sacchini, Jommelli et Piccinni, Cimarosa et Paisiello. Les plus longs développements sont consacrés à Gluck, érigé père de la tragédie (Berton voit dans l’acte central d’Orphée « le type du beau idéal en musique », p. 23) et à Grétry, auquel revient le titre de père de la comédie. Si l’on ajoute à ces noms celui de Méhul et celui de Mozart (« le Michel-Ange de la musique », p. 30), se dessine une constellation de modèles dont les œuvres auraient pour Berton « fixé les règles de l’art musical » (p. 34) : gouvernées par l’« unité d’intérêt », celles-ci passeraient par la sobriété des moyens, la simplicité et la concision au service d’une recherche, morale, de la vérité de l’expression et d’une énergie des passions.
A ce légitimisme musical s’oppose une jeune école farouchement combattue par Berton, en ce qu’elle privilégierait au contraire la profusion de moyens accessoires, la violation des convenances dramatiques, le culte de l’effet, la mise en péril des voix par des instrumentations trop chargées et par l’envahissante « roulade ». Puisque la jeune école appelle « philosophique » la musique des grands maîtres, Berton choisit de nommer « mécanique » celle de ses adversaires, à la fois parce que cette musique serait réduite « au seul emploi de ses moyens physiques » et privée « de ceux que lui donne la puissance de sa partie morale » (p. 40), et parce qu’un homme comme Maëlzel, l’inventeur du métronome, pourrait très bien produire mécaniquement ce type de musique ! « Musique philosophique » et « musique mécanique » constituent finalement deux orientations esthétiques face auxquelles les jeunes compositeurs devraient se positionner, ces orientations s’inscrivant à la fois dans la querelle renouvelée des Anciens et des Modernes, et au cœur de celle des classiques et des romantiques.
Emmanuel REIBEL
12/06/2017
Pour aller plus loin :
Olivier Bara, « Les voix dissonantes de l’anti-rossinisme français sous la Restauration », Chroniques italiennes, n°77/78, 2006, p. 107-125.
Emmanuel Reibel, Comment la musique est devenue « romantique » de Rousseau à Berlioz, Paris, Fayard, 2013, p. 255 sq.
éditions numérisées | |
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genre | Essai |
éditeur | Alexis Eymery |
lieu d'édition | Paris |
années d'édition | 1826 |
nombre de pages | 48 |
langue originale | français |
repris de |
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