Il Sogno 101. Mémoires présentés et commentés par Luciano Martinis et Alessandra Carlotta Pellegrini, sous la coordination de Sharon Kanach
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Il Sogno 101 est l’autobiographie en deux parties de Giacinto Scelsi (1905-1988), publiée pour la première fois dans sa forme bipartie en français en 2009 par les éditions Actes Sud avec une introduction et des commentaires rédigés par Alessandra Carlotta Pellegrini et Luciano Martinis, l’édition étant coordonnée par Sharon Kanach.
L’origine des deux textes qui composent l’ouvrage peut être retracée dans certains enregistrements sur bande magnétique de la voix du compositeur. Le premier texte, Il Sogno 101. Première partie, recueil des mémoires, en prose, a été dicté en quatre séances en mars 1973 avant d’être transcrit en deux versions dactylographiées, une corrigée et annotée par le compositeur lui-même, l’autre, destinée à la publication, réalisée quelques années plus tard par Antonietta Alfano sur la base de la première transcription. Le second, Il Sogno 101. Seconde partie. Le retour, récit onirique en vers, a été enregistré par Scelsi dans la nuit du 27 au 28 décembre 1980 et puis dactylographié par Rossana Suergiu. Bien que Scelsi ait écrit en français ses poèmes et la plupart de ses textes en prose, c’est en italien qu’il a dicté les deux parties de l’autobiographie. L’histoire singulière de la production de ces textes suit ainsi en tous points le processus créatif des œuvres musicales de Scelsi, d’abord improvisées et enregistrées, puis transcrites par des tiers et enfin recorrigées et approuvées par le compositeur. De même, l’histoire éditoriale de l’ouvrage ne manque pas d’être atypique : la seconde partie de l’opus est en fait la première à être publiée, en italien, par les éditions Le parole gelate (Rome, 1982), sous le titre Il sogno 101. Seconda parte. Il ritorno, tandis que la première partie sera publiée à titre posthume, selon les souhaits du compositeur lui-même. Scelsi avait effectivement estimé opportun de laisser s’écouler dix à quinze ans après sa mort avant de la publication de ses mémoires, en raison des nombreuses références à des événements de caractère privé et à des personnes encore en vie à l’époque. Ainsi, bien que de courts extraits aient déjà été publiés en italien à partir de 1990 dans la revue de la Fondation Isabella Scelsi i suoni, le onde... et en français dans le volume Les Anges sont ailleurs (Arles, Actes Sud, 2006), il faut attendre l’édition Actes Sud de 2009 pour voir la première partie publiée, directement en traduction française, et suivie de la traduction du texte publiée en 1982, dans le volume Il Sogno 101 (traduction par Anne Giannini et Irène Assayag). Le texte des mémoires dans sa langue originale est publié pour la première fois en Italie dans le volume Il sogno 101. Prima e seconda parte (Macerata, Quodlibet, 2010) édité par Luciano Martinis et Alessandra Carlotta Pellegrini, qui réunit les deux textes, précédés d’un hommage en vers et en prose du compositeur Sylvano Bussotti intitulé Sonetto Scelsi (nel rigore geometrico dell’ombra) et d’un essai introductif du musicologue Quirino Principe. En outre, le contenu du premier texte de l’édition italienne n’est pas identique à celui du texte publié dans l’édition française ; en effet, ce dernier ne traduit pas intégralement le texte de la transcription officielle, contrairement à l’édition italienne, qui se révèle ainsi plus exhaustive. Une traduction allemande des deux textes est parue quelques années plus tard dans le premier volume de l’anthologie dédiée aux écrits du compositeur Die Magie des Klangs. Gesammelte Schritten (Cologne, MusikTexte, 2013) édité par Friedrich Jaecker (traduction par Monika Lichtenfeld et Martina Seeber) sous les titres Der Traum 101. Erster Teil et Der Traum 101. Zweiter Teil. Die Rückkehr.
C’est la première partie de l’opus (traduite par Anne Giannini) qui contient les éléments autobiographiques du compositeur. Il s’agit de mémoires épars, enrichis de petites anecdotes et de digressions sur l’art, la musique, le mysticisme et le yoga, à travers lesquelles on retrouve tant l’image intérieure (et peut-être idéale) du compositeur que son image historique. De nombreuses pages sont consacrées aux passages marquants de sa vie (les années d’enfance passées dans le château de famille à Valva, la jeunesse passée à Rome puis à Paris, le séjour en Suisse pendant la Seconde Guerre mondiale, le retour à Rome après la guerre et la fondation de la Rome-New York Art Foundation) et de son activité artistique (ses études musicales, les débuts sur la scène musicale européenne dans les années 1930 avec la première exécution de Rotativa à Paris, la crise compositionnelle et le retour à la composition, les premières exécutions et l’intérêt croissant pour sa musique pendant les dernières années de sa vie) ; surtout, on y trouve de nombreuses références aux milieux artistiques et mondains fréquentés à Rome, à Paris et en Suisse. Parmi les musiciens et artistes mentionnés dans le texte avec lesquels Scelsi est entré en contact et, dans certains cas, a tissé des liens d’amitié, figurent Pierre Boulez, Constantin Brancusi, John Cage, Alfredo Casella, Jean Cocteau, Alfred Cortot, Roger Désormière, Michiko Hirayama, Pierre Jean Jouve, Guy Lévis Mano, Nikita Magalov, Igor Markevitch, Henri Michaux, Pierre Monteux, Gabriel Pomerand, Karlheinz Stockhausen et Vladimir Vogel.
Le retour (traduit par Irène Assayag) ne contient pas d’éléments autobiographiques explicites, mais un flux continu de visions oniriques qui affectent l’âme du compositeur dans son voyage post-mortem vers sa « prochaine incarnation ». Dictée en une seule nuit, d’une manière qui rappelle les improvisations en état de transe de ses propres compositions, l’œuvre s’apparente aux expériences d’écriture automatique des surréalistes. Le poème est un itinéraire à travers la mémoire des vies antérieures du compositeur, riche en images symboliques et ésotériques, qui nous permet de mesurer le poids que la dimension spirituelle (notamment la pratique du yoga et de la méditation, les études dans le domaine de la théosophie et de l’anthroposophie, ainsi que l’intérêt pour les doctrines religieuses orientales) a eu dans sa vie.
Tommaso VIGNA
21/11/2023
Pour aller plus loin
Giacinto Scelsi, Il sogno 101. Seconda parte. Il ritorno, Le parole gelate, Rome, 1982.
Giacinto Scelsi, Les anges sont ailleurs…, Textes et inédits recueillis et commentés par Sharon Kanach, Actes Sud, Arles 2006.
Giacinto Scelsi, Il Sogno 101, Mémoires présentés et commentés par Luciano Martinis et Alessandra Carlotta Pellegrini, sous la coordination de Sharon Kanach, Arles, Actes Sud, 2009.
Giacinto Scelsi, Il sogno 101. Prima e seconda parte, Macerata, Quodlibet, 2010.
Giacinto Sceli, Die Magie des Klangs. Gesammelte Schritten, Cologne, MusikTexte, 2013.
genre | Autobiographie (Mémoires) |
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éditeur | Actes Sud |
lieu d'édition | Arles |
années d'édition | 2009 |
pages | 317 |
édité par | Luciano Martinis, Alessandra Carlotta Pellegrini |
langue originale | italien |
compositeur | |
traducteur | |
identique à | http://ark.bnf.fr/ark:/12148/cb42062589f |